Un apprentissage dans la joie, par Didier Chabbert

Piste d'écriture: Transmission

Deux hommes assis côte à côte sur des sièges pliants, devant deux chevalets, face au marais salant. Passant, lors d’une balade sur ce chemin, je m’arrête et j’observe. Je suis saisi de voir le paysage en train de se former avec délicatesse sur le papier. Le jeu de l’eau, les touches de couleur. Je m’approche à nouveau et simplement je dis : « c’est beau ». Le travail d’aquarelle se poursuit, sans empêcher l’échange, au contraire : voyant mon intérêt, les deux peintres me proposent de me joindre à eux une prochaine fois. À cet instant, je ne sais si la proposition est réelle ou s’ils plaisantent. Plus tard, je saurai que ce sont deux amis qui ont l’habitude de travailler ensemble sur un même motif, chacun à sa manière. 

J'ai depuis pas mal de temps acquis le matériel de base pour l’aquarelle, du papier, des pinceaux et des couleurs. Je possède également quelques livres permettant d’apprendre la technique et de reproduire des modèles proposés. C'est scolaire et un peu ennuyeux. 

Une autre fois, plus tard dans l’été, je revois l’un des deux hommes, Jean, lors d’une exposition de ses aquarelles dans une salle du village. Il est en cours de réalisation d’une grande aquarelle représentant des éléments maritimes. J’aime beaucoup son travail, je suis admiratif, je regarde, j’observe sa manière de prendre l’eau dans son pinceau, de choisir et former les couleurs, puis de caresser le papier en douceur et faire naître son projet. 

Constatant à nouveau mon intérêt pour cette technique et mon désir d’apprendre, Jean me propose de venir un après-midi avec mon matériel. C'est chose faite quelques jours plus tard. Je suis débutant et Jean, avec bienveillance, a compris ce que j’attendais. Il regarde le matériel dont je dispose et me conseille sur le choix du papier, le choix des pinceaux, les bonnes marques pour les godets d’aquarelle. Il insiste sur la nécessité d’acquérir un excellent matériel pour travailler une belle matière. Puis, il me propose de revenir le lendemain pour commencer à travailler et dit que, si nous sommes deux à peindre, cela fera une animation pour l’exposition. 

Jean m’apprend, me montre avec patience comment reproduire le mouvement de l’eau, dessiner un bateau, les mâts, les voiles, les cordes, le tracé sur l’eau, tant et tant de choses. 

 Je suis heureux, j’assimile avec plaisir. Jean est devenu mon maître, mais aussi mon ami. 

 

L’année suivante, nous sommes trois, posés sur le chemin au même endroit, en ce lieu où j’avais fait leur rencontre. 

 Le même marais salant, la maison abandonnée au fond et, devant, les saladelles. « Vas-y, plus rouge les saladelles, il faut faire péter les saladelles ». De précieux conseils que je garde en mémoire, et un apprentissage dans la joie partagée. 

Copyright texte et illustration: Didier Chabbert

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